Vincent Robert : Il existe près de 80 satellites naturels de Saturne, dont les 8 « majeurs » que sont dans l’ordre d’éloignement à la planète : Mimas, Encelade, Téthys, Dioné, Rhéa, Titan, Hypérion et Japet. Parmi eux, Titan est un cas d’étude particulièrement intéressant de par ses caractéristiques. Il est le plus grand satellite naturel de Saturne, mais aussi le deuxième plus grand satellite du Système solaire (notre Lune n’est qu’au rang 5) – son diamètre est même plus grand que celui de la planète Mercure – et le seul satellite du Système solaire à posséder une atmosphère dense et développée à 98 % de diazote, soit la seule atmosphère riche en diazote avec la Terre dans le Système solaire !
De la même manière que la Lune s’éloigne chaque année de la Terre de 3,8 cm, Titan s’éloigne de Saturne. Seulement, nous avons démontré que Titan s’éloigne 100 fois plus vite que prévu : l’expansion orbitale de Titan est bien plus rapide que ce que prévoyait alors la théorie.
Les systèmes planète-satellite(s) sont complexes à modéliser car de nombreux effets physiques à court, moyen et long termes sont à prendre en compte pour en refléter la dynamique orbitale. Plus particulièrement, les effets de marées traduisent des échanges d’énergie entre la planète et son ou ses satellites. Notre Lune par exemple lève un bourrelet de marées sur la Terre par son interaction gravitationnelle. Sous l’action de ce bourrelet de marées, une partie du mouvement de rotation de la planète est transférée vers l’orbite de la Lune. En conséquence, la Lune s’éloigne et la Terre ralentit sa rotation.
La plupart des satellites naturels du Système solaire sont soumis aux mêmes lois et effets. Pour autant – et c’est une des conclusions de l’étude qui explique l’expansion rapide de Titan –, la mécanique des effets de marée dans le système de Saturne (gazeux), ne serait pas le même que dans le système Terre-Lune (tellurique).
Cela ajoute une nouvelle pièce au puzzle qui permet d’avancer sur le débat de l’âge du système de Saturne, de la formation de ses anneaux et de ses satellites. Nos résultats sont aussi en concordance avec la nouvelle théorie de Fuller et al. qui explique et prédit comment les planètes affectent les orbites de leurs satellites, en opposition avec les modèles plus « historiques » qui sont utilisés depuis près de 50 ans.
En démontrant que l’âge et la formation du système saturnien doivent être revus, nous ouvrons un nouveau champ d’investigation : les mêmes théories « classiques » et formules qui décrivaient alors l’expansion des satellites naturels ne peuvent plus être appliquées à l’ensemble des lunes du Système solaire. En conséquence et plus généralement, cela implique un réexamen de nombreux objets astrophysiques, allant des lunes de Jupiter aux systèmes d’étoiles multiples, sans oublier les exoplanètes qui gravitent autour d’autres étoiles que le Soleil.
Pour en savoir plus, consultez l’article sur le site de Nature Astronomy ainsi que le communiqué de la Nasa sur le sujet